Joséphine Vallé Franceschi / Exposition au Consulat, lieu éphémère et itinérant / Octobre 2018

Joséphine Vallé Franceschi / Exposition au Consulat, lieu éphémère et itinérant / Octobre 2018

Les voyages, une fois terminés, n’ont d’objet que la mémoire. On en revient avec des souvenirs, un visage, un moment, une fin de journée, finalement des choses dont on ne sait pas quoi faire : l’intensité des instants laisse place à l’émotion des réminiscences. C’est pourquoi j’ai entrepris de sauver l’une et l’autre, non seulement en prenant des photographies, mais encore en utilisant une technique de surimpression. Avec un appareil argentique, je prends une première photographie, bloque la prise de vue, et en prends une deuxième, parfois une troisième, qui se superpose à la première. Les clichés sont pris dans des lieux et à des moments différents.

Les effets de transparence, les variations de luminosité et le jeu des couleurs sont naturels. Je ne retouche rien, les images apparaissent telles qu’elles ont été prises, sans travail de post production ou de retouche. Je ne recherche pas en effet la perfection, mais l’harmonie. Où est l’artifice, la poésie n’est pas, c’est ma conviction. Le hasard est le principal enjeu de mon travail. Ce n’est qu’au développement que je découvre le résultat. Il est heureux, seulement quelques fois.

L’art est une fin en soi. Son rôle n’est pas de transfigurer la réalité mais de créer une autre réalité, que seule l’imagination peut atteindre. L’endroit et l’heure de mes photographies se veulent indécelables. La superposition de deux moments rompt avec le supposé réalisme de la photographie. Mes clichés sont des propositions pour l’imagination ; leurs histoires ne sont pas figées. Chacun y voit ce qu’il souhaite ; et il y a autant d’interprétations possibles que de regards.

Je suis moins attachée à la force du temps et des lieux qu’à celle des personnes, qui transforment un moment en une rencontre, la banalité en féerie, le commun en extraordinaire. De cette réunion entre des individus, des endroits et des instants, naissent des images oniriques sélectionnées par notre mémoire dans le flux des souvenirs. Le temps qui passe constitue, pour chacun de nous, un musée intérieur qu’on visite avec joie, tristesse ou avec un mélange des deux qu’on appelle la nostalgie. Les contours s’estompent, les détails deviennent insignifiants ; la réalité s’efface : subsistent des impressions à partir desquelles on fabrique des songes. C’est mon travail.